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Homélie du 4ème Centenaire – dédicace de la consécration de l’église
Pié Foulard – 25 Octobre 2018


Isaïe 56, 1- 6-7 ; 1 Pierre 2, 4-9 ; Luc 19, 1-10


Accueil : jour particulier : clôture du jubilé des 400 ans de la fondation de votre congrégation et la dédicace de l’église du monastère de l’Annonciation, le vôtre, ici, à Pié Foulard, en union avec les monastères Notre Dame à Bouzy-la-Forêt, de la Présentation à Angers, du Mont des Oliviers à Jérusalem. Le Christ continue à dire à chacun (e) « je veux aller loger chez toi ». Une invitation qui nous est faite afin de nous laisser tailler à la dimension de l’amour du Père et qu’il puisse y faire sa demeure. Reconnaissons que nous avons besoin de sa paix et de son pardon.

Permettez-moi, mes soeurs, en ce jour de fin de jubilé, de me référer à votre histoire et d’être un peu plus long que d’habitude !


L’exposition posée à l’oratoire, rappelle que vous faites partie de cette famille « des femmes en chemin » depuis 1617 venant de Fontevrault pour rejoindre le Poitou en vue de vivre la règle de St Benoit de façon plus ajustée sous la conduite de Madame Antoinette d’Orléans. Depuis, la « Congrégation des Bénédictines de Notre Dame du Calvaire » a poursuivi son chemin, malgré les embûches, le jansénisme, les luttes de toutes sortes, la révolution et ses bouleversements. En fêtant ce parcours de votre histoire, vous avez tenu à redire ce qui vous fait vivre avant tout : « dans la lumière de Pâques, la joie de vivre en présence du Seigneur - dans la simplicité d’une vie fraternelle, un esprit de grâce et de com-passion ».


Vos pérégrinations vous ont conduites à Poitiers au plan du Calvaire et rue Riffault puis à St Julien l’Ars ce qui vous a permis de développer de fructueuses relations au sein des populations. Des reliquaires, vous appartenant, sont aussi déposés au trésor de la cathédrale comme symboles des liens tissés avec le diocèse. Le Poitou, qui vous a accueillies, est devenu vôtre et fait désormais largement partie intégrante de votre histoire. Et en 1999, comme Zachée, vous avez cherché, selon vos traditions, à prendre de la hauteur pour voir si Jésus ne passait pas par là, aussi, en terre protestante. Vous avez pris le risque qu’on vous fasse ce reproche, « elles sont allées loger chez des pécheurs » ! N’y aurait-il pas chez les uns comme chez les autres, entre frères et soeurs, dans la même foi, du bon pain à partager ? De fait, les pierres et les murs de ce bâtiment nous ont été transmis par ceux et celles qui ont vécu et travaillé ici, qui ont aimé, se sont aimés, ont souffert et espéré en ces mêmes lieux, mais, de votre part, dès votre arrivée, il y avait une volonté marquée du sceau oecuménique, fortement exprimée chaque année, en particulier, le matin de Pâques. Espace désormais consacré à la prière entre autres pour l’unité des chrétiens, entre les hommes et en votre propre coeur - lieu de rassemblement de la communauté plusieurs fois dans la journée - lieu d’accueil de tous, vos voisins, amis, retraitants, visiteurs et aussi l’étranger comme le redisait Isaïe, pour construire l’alliance avec notre Dieu – figure du corps du Christ posé au centre du choeur et qui vit par le don et l’offrande du coeur fait de chair et de sang, de vos vies, des nôtres. L’Eucharistie célébrée, les heures de prière assurées, les temps de méditation, les fleurs sans cesse rafraichies, font de ce lieu l’expression de l’amour qui rallume et tourmente les esprits – ils permettent, en continu, la possibilité d’inscrire dans le simple quotidien l’Ecriture et les paroles du Christ, ce Royaume de Dieu dans le déjà là et dans l’ici et maintenant. Ils affermissent les pierres jugées parfois inutilisables pour devenir des pierres vivantes, le Christ restant la pierre d’angle, et nous sommes les humbles serviteurs pour cette construction qui exige sans cesse une certaine détermination afin de permettre la régénération, marcher sur les chemins où personne ne va, voir ceux que personne ne regarde, ouvrir la bouche pour dire la parole qui relève, tendre les mains pour construire la paix.


Au cours de l’année passée, certaines étapes ont marqué ceux et celles qui vous observent, comme le colloque d’histoire sur la vie religieuse et les 400 ans de votre congrégation, et cette fameuse soirée assurée par vous le 27 Octobre 2017 dans le choeur même de la cathédrale et renouvelée ici le 21 avril dernier : relever le défi de chanter le Plain-chant baroque des 17èmeet 18èmes. Comme a pu le dire François de la Feillée, mots retranscris sur la pochette du CD, « ce chant exige des voix justes, moelleuses et d’une certaine étendue ; il exige également beaucoup de grâce et d’expression ». Cela, vous avez su l’assurer comme composante d’une richesse musicale et stimulée par la luminosité et la générosité de votre foi. Rappel, qu’en liturgie, la diversité de l’illustration de la foi ne peut que se renouveler au fil des siècles si elle veut res-ter parole vivante comme une caresse qui dit la bonté de Dieu. Ainsi, peut naître, se développer, se construire une communauté.


Enfin, « Renovamini », écrit en gros, partout, est bien le maitre mot ! vous souvenant ce que l’apôtre Paul écrivait aux Ephésiens : « laissez-vous renouveler par l’action de l’Esprit, afin de revêtir l’homme nouveau selon Dieu dans la justice et la sainteté ». Cette proposition nous rappelle le § 221 de « Laudato si » : « S’ouvrir à la conversion comme la conscience que chaque créature reflète quelque chose de Dieu et a un message à nous enseigner » … et que le « Christ, ressuscité, habite au fond de chaque être ainsi que toutes les créatures et le monde qui les entoure ». Ces phrases ratifient les panneaux de l’exposition : « que demeure en chacun(e) l’Esprit d’unité, de paix, d’amour, de joie, de vie ». St Pierre disait déjà : « nous sommes de cette nation sainte pour annoncer les merveilles de celui qui nous conduit à son admirable lumière ». Voici le rôle du veilleur qui repère l’étoile scintillante de la nativité, ce qui permet de maintenir vivante la soif de réforme présente dès votre fondation et qui reste la petite flamme au fond de chacune d’entre vous par l'effet de votre consécration ! Mais cela, par discrétion, vous le portez en vous comme une future naissance ! Cela valait bien un jubilé « pour rendre grâces au Fils de l’Homme qui est venu chercher et sauver ce qui était perdu »!


Ainsi que vous le proposiez pour l’exposition, vous nous avisez « d’accepter d’admirer sa qualité esthétique » ; je rajouterai d’en faire de même pour l’édifice qu’est cette église, votre congrégation, votre communauté, afin de nous laisser conduire à considérer l’ensemble comme une oeuvre à part entière « digne d’appartenir au peuple de Dieu » et « en capacité d’annoncer au monde ses merveilles».

Amen

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